Santé

Mélanome : Faut-il consulter un dermatologue pour surveiller votre peau ?

2025-03-10

Auteur: Marie

Un récent reportage d’Envoyé Spécial sur France 2 a mis en lumière la pénurie de dermatologues en France et les conséquences parfois dramatiques que cela entraîne. Parmi les témoignages marquants, l'histoire de Marion, dont le mélanome, un cancer de la peau particulièrement agressif, a été diagnostiqué trop tard, ce qui a rendu la guérison impossible. « Les retards de diagnostic mettent en péril la santé des patients et constituent une perte de chance inacceptable », a déclaré la Société française de dermatologie après cette émission. Il est évident que de nombreux Français rencontrent des difficultés à obtenir un rendez-vous chez un spécialiste, tandis que d'autres inondent les salles d'attente sans raison valable.

Le Dr Jean-Nicolas Scrivener, dermatologue au CHU de Strasbourg, souligne que « de nombreuses personnes viennent nous consulter alors que cela s'avère inutile. Par exemple, des jeunes parents avec leurs enfants, qui ne sont pas à risque de mélanome, occupent des créneaux précieux ». En réalité, ce cancer touche principalement les personnes de plus de 60 ans et est très rare chez les enfants. L'idée selon laquelle il est impératif de faire surveiller sa peau et ses grains de beauté une fois par an est solidement ancrée dans l'esprit du public. Le Pr Gaelle Quéreux, chef de service de dermatologie au CHU de Nantes, affirme que « non seulement il est impossible de suivre toute la population chaque année, mais le dépistage systématique n’a jamais prouvé son efficacité pour réduire la mortalité due au mélanome, qui reste relativement rare par rapport à d’autres types de cancer (environ 18 000 cas diagnostiquer chaque année) ».

Dépister uniquement les personnes à risque

Il est crucial de se concentrer sur le dépistage des individus les plus vulnérables. Comme le précise le Dr Scrivener, « en consultant régulièrement, vous pourriez détecter des mélanomes peu agressifs qui n’auraient pas évolué vers les formes mortelles, mais vous risqueriez de manquer une lésion évolutive, notamment si elle se situe dans des zones moins visibles comme le cuir chevelu, le dessous des pieds ou la bouche ». Une manière de cantonner l’afflux inutile chez les dermatologues est de diriger les dépistages vers les personnes à risque. « Ceux qui appartiennent à un groupe à risque doivent veiller sur leur peau et envisager un dépistage régulier, » encourage le Pr Quéreux.

Dans tous les cas, le premier interlocuteur doit être le médecin traitant. Bien qu’il y ait actuellement 2928 dermatologues actifs en France, les délais d'attente pour obtenir un rendez-vous s'étendent parfois sur plusieurs semaines, voire des mois, selon les régions. Des systèmes de télé-expertise se mettent en place dans certaines zones, permettant aux médecins généralistes de soumettre des photos à des dermatologues pour avis.

Qui est à risque ?

Tous ne sont pas égaux face au mélanome. Les individus ayant la peau claire, les cheveux roux ou blonds, et qui bronzent difficilement, sont plus exposés au risque que ceux à la peau mate. La présence de taches de rousseurs est aussi un facteur à prendre en compte. De plus, avoir subi des coups de soleil durant l'enfance ou posséder une peau parsemée de nombreux grains de beauté (plus de 50) augmente considérablement les risques de développer un mélanome. Contrairement à une idée reçue, dans 80 % des cas, ce type de cancer ne se développe pas à partir d'un grain de beauté existant.

Être immunodéprimé, avoir des antécédents familiaux de mélanome ou avoir déjà eu un mélanome sont également des facteurs de risque. Plus un individu présente de facteurs de risque, plus il est essentiel de consulter un médecin en cas de doute. Par exemple, un grain de beauté qui change de taille, de couleur ou qui saigne doit attirer l’attention. Le Dr Scrivener évoque également des lésions achromiques (sans couleur) ou des nodules qui apparaissent sous la peau et augmentent rapidement en taille.

Pour aider le grand public à identifier les signes inquiétants, la règle ABCDE est souvent utilisée : A pour asymétrie, B pour bords irréguliers, C pour couleur non homogène, D pour un diamètre supérieur à 6 mm, et E pour évolution de la tache. Cependant, le Dr Scrivener met en garde : « Cette règle a été conçue par des professionnels de la santé pour leurs propres besoins, il peut être anxiogène pour le grand public. Par exemple, certaines kératoses séborrhéiques passent souvent pour des grains de beauté mais sont inoffensives. » Voilà une autre raison pour laquelle consulter d’abord son médecin traitant est préférable avant de se rendre chez le dermatologue.