Dans le monde du travail, il arrive parfois que des employés, poussés à bout par des décisions managériales, prennent des mesures pour régler leurs comptes. C'est exactement ce qu'a fait Davis Lu, un développeur chevronné chez Eaton Corp, géant américain de la gestion de l'énergie. En 2018, alors que l'entreprise entame une restructuration et que la menace du licenciement plane, Lu, au lieu de céder à la panique, décide de faire preuve d'ingéniosité malicieuse.

Ce qui aurait pu n'être qu'une histoire banale de licenciement devient une affaire digné d'un film d'action : Davis Lu développe un « kill switch » logiciel capable de bloquer tous les systèmes informatiques de son employeur le jour de son licenciement. Ce dernier, nommé IsDLEnabledinAD, vérifie en continu son statut au sein de l'entreprise. Si Lu est licencié, la catastrophe est immédiate : serveurs inaccessibles, opérations paralysées, et collaborateurs bloqués.

Le jour fatidique du 9 septembre 2019, lorsque Lu est effectivement licencié, son code se déclenche, plongeant Eaton Corp dans le chaos. Bien que la société affirme avoir perdu des centaines de milliers de dollars suite à cet acte, l'enquête du FBI révèle des traces irréfutables : Lu a planifié cette action avec une précision chirurgicale.

Le verdict, rendu en mars 2025, pourrait coûter à Lu jusqu'à dix ans de prison. Le parallèle avec d'autres formes de résistance technologique n’est pas anodin : l'histoire de Lu rappelle les luttes des luddites, qui au XIXe siècle, détruisirent les métiers à tisser perçus comme des menaces à l'emploi, ou encore les membres du groupe CLODO en France, qui se battirent contre l'informatique de contrôle.

Face à cette situation, la grande question demeure : Davis Lu est-il un criminel ou un employé désespéré ? Si ses motivations peuvent sembler justifiables pour certains, son acte ne fait que ternir l'image des professionnels du secteur informatique, rappelant que derrière chaque ligne de code se cache une dimension humaine. Peut-être aurait-il dû trouver une méthode moins destructive de porter son mécontentement, car, après tout, le soutien et une communication ouverte sont souvent les meilleures solutions dans un environnement de travail tendu.

Aujourd'hui, les conséquences de ses actes pourraient lui fermer les portes de nombreuses entreprises. Sa carrière est probablement compromise, mais la réalité derrière le code et l'informatique corrompue soulève des questions éthiques sur la responsabilité des employeurs vis-à-vis de leurs employés. En fin de compte, la véritable leçon à tirer de cette histoire dramatique est que la technologie peut aussi devenir une arme à deux tranchants.