
Vaclav Smil : Quand la science devient un cirque - Des révélations inquiétantes sur la transition énergétique
2025-04-06
Auteur: Sophie
Si vous êtes insouciant au sujet de la transition énergétique, méfiez-vous des écrits de Vaclav Smil. Ce spécialiste de l'énergie et des ressources, d'origine tchèque et basé au Canada, est connu pour son réalisme radical, balayant les fausses solutions et les discours simplistes. Son dernier livre, "2050. Pourquoi un monde sans carbone est presque impossible" (éd. Arpa), alerte sur l'illusion de la neutralité carbone d'ici 2050, un objectif que se fixe l'Union européenne. Smil analyse les défis colossaux à surmonter, démontrant que les transitions ne se font pas rapidement, mais plutôt lentement et avec difficulté.
Lors d'un entretien récent, il a souligné que même si une mobilisation sans précédent pourrait permettre d'atteindre cet objectif, la réalité actuelle semble bien éloignée. Les combustibles fossiles, malgré une légère baisse de leur utilisation, demeurent encore prédominants dans notre bouquet énergétique mondial, passant de 86 % à 82 % en plus de 25 ans. À ce rythme, la transition totale semble être à des siècles de distance.
En effet, selon une étude de DNV, nous pourrions passer d'une répartition énergétique actuelle de 80/20 (fossile/renouvelable) à une proportion plus équilibrée de 50/50 d'ici 2050. Pourtant, même avec cette transition, la dépendance aux combustibles fossiles resterait significative, à peu près au même niveau qu'en 1995.
Smil met également en lumière que les nouveaux technologiques, comme l'hydrogène vert et les batteries, n'ont pas encore fait leurs preuves de manière convaincante à grande échelle. Les défis techniques et les besoins en matières premières, dont l'extraction pose des questions environnementales et géopolitiques, compliquent encore les choses. Par exemple, la production de l'hydrogène vert pour décarboniser l'industrie de l'acier nécessiterait une quantité d'électricité équivalente à 40 % du réseau national français.
Le professeur souligne également que depuis le protocole de Kyoto en 1997, l'utilisation mondiale des combustibles fossiles a augmenté de 55 %. Ceci est un indicateur alarmant sur notre chemin vers la durabilité. Ainsi, même si les énergies renouvelables progressent, leur montée en puissance est encore très limitée par rapport à la nécessité d'une réduction drastique des combustibles fossiles.
Loin d'être un sauveur miracle, le nucléaire, bien que peu émetteur de carbone, est confronté à des coûts exorbitants et des retards constants dans la construction de nouveaux réacteurs. L'exemple du réacteur EPR à Flamanville, qui a subi des retards de plus de 12 ans et des dépassements de budget, en est un parfait exemple.
Finalement, Smil met en garde contre l'optimisme technologique dans le débat sur le changement climatique. Les infrastructures fossiles sont encore très ancrées, et les transitions prennent souvent plus de temps que prévu. Le défi de la transition énergétique exige donc un regard pragmatique sur les réalités techniques et économiques, loin des slogans et des promesses non tenues.