Monde

Syrie : Le phénomène inquiétant de la déradicalisation du groupe HTC

2025-01-08

Auteur: Marie

Patrick Haenni, chercheur associé à l’Institut universitaire européen de Florence, se penche sur Hayat Tahrir Al-Cham (HTC) et ses ramifications à travers les territoires opposants en Syrie depuis plus d’une décennie. Ses entretiens réguliers avec le leadership du mouvement, notamment avec son chef Ahmed Al-Charaa — initialement à Idlib, puis à Damas après la chute du régime de Bachar Al-Assad le 8 décembre 2024 — lui permettent de fournir un éclairage précieux sur la stratégie actuelle de HTC.

La question cruciale demeure : comment Ahmed Al-Charaa parvient-il à tirer parti de sa récente victoire contre le régime d’Al-Assad ?

Cette victoire, qui a impliqué diverses factions et près de 30 000 combattants, représente un accomplissement collectif, mais aussi le résultat d’un habile coup de maître orchestré par Al-Charaa. Ce dernier a su naviguer habilement entre les tensions internes et les pressions extérieures. À Idlib, certains auraient préféré s’appuyer sur une gouvernance locale pour favoriser une normalisation progressive avec la communauté internationale. Or, cela s’est heurté à une forte opposition, tant de l'Occident que de l'ONU, qui ont maintenu HTC sur leur liste noire d'organisations terroristes.

Par ailleurs, de nombreux États de la région ont opté pour une normalisation de leurs relations avec Al-Assad, craignant un nouvel embrasement militaire dans une région déjà secouée par les conflits, comme ceux observés lors de la guerre à Gaza. Le contexte géopolitique complexe renforce la position d’Al-Charaa, qui, avec une approche plus "modérée", pourrait redéfinir les rapports de force non seulement en Syrie, mais également dans le cadre plus large du Moyen-Orient.

Il est essentiel de comprendre que la déradicalisation par le haut, menée par des figures comme Al-Charaa, pose des questions fondamentales sur l’avenir du mouvement et les implications pour la paix en Syrie. La dynamique actuelle pourrait représenter un tournant inattendu, celui d’un groupe qui, profitant de la fragmentation des opposants, pourrait devenir un acteur central d’une Syrie en pleine redéfinition.