Monde

Springfield : Entre chats, migrants haïtiens et tensions sociales, un reflet des luttes américaines

2024-09-18

Démystifions cette inquiétude : les amoureux des chiens et des chats peuvent se rassurer. Les migrants haïtiens de Springfield ne s'attaquent pas aux animaux de compagnie. Le fait même de devoir le préciser souligne les tensions qui secouent cette petite ville de l'Ohio. Une tempête artificielle, engendrée par les discours de Donald Trump. Lors d’un débat télévisé avec Kamala Harris le 10 septembre, l’ancien président a relancé cette rumeur persistante de Facebook, transformant les Haïtiens en symbole grotesque de la menace migratoire que, selon lui, représentent les démocrates pour les États-Unis.

Les répercussions ont été immédiates. La ville a enregistré des dizaines d'alertes à la bombe, dont l'origine reste incertaine. Le festival culturel prévu pour fin septembre a été annulé, tandis que les écoles fermaient leurs portes et que les universités effectuaient leurs cours en ligne. Pour ajouter à l'incertitude, Trump a récemment annoncé sa venue à Springfield.

Dans un centre communautaire haïtien, la directrice des opérations, Rose-Thamar Joseph, fait face à une montagne de 280 e-mails en attente. Les messages de soutien affluent de tout le pays. "Nous sommes concentrés sur la communauté haïtienne, mais c'est Springfield dans son ensemble qui souffre de cette situation", explique-t-elle, maîtrisant admirablement le français. "J'étais choquée et stupéfaite d'entendre Trump. On attendrait d'une personnalité de ce rang qu'elle prenne des faits vérifiables en considération."

Viles Dorsainvil, directeur du centre, se retrouve débordé. Travaillant également au bureau d'aide sociale de la ville, cet homme réfléchi de 38 ans joue un rôle clé de liaison avec les autorités. Avec une équipe de bénévoles, il a diffusé des conseils de sécurité à la communauté. "Nous exhortons ceux qui en ont les moyens à installer des alarmes et des caméras chez eux, et à sortir uniquement en groupe. C’est une période particulière", confie-t-il.

"J'aime la diversité de Springfield", ajoute le directeur. "Mais un petit groupe de suprémacistes, entre cinq et dix personnes, a récemment défilé armé et masqué pour intimider. Il y a eu aussi des actes de vandalisme et des commentaires racistes. C’est une période difficile, mais nous restons dignes."

En vérité, les conflits à Springfield illustrent des problèmes bien plus larges qui touchent l'Amérique d'aujourd'hui. Cette petite ville est devenue un microcosme des angoisses nationales, miroir de la polarisation qui traverse la société américaine. Avec l'élection présidentielle qui approche, les tensions se intensifient et le besoin de dialogue et de compréhension mutuelle n'a jamais été aussi pressant.