Divertissement

Pourquoi le tournage en plan-séquence d'"Adolescence" est une véritable prouesse cinématographique

2025-04-06

Auteur: Louis

La série événement qui fait trembler Netflix, "Adolescence", plonge les spectateurs dans l'esprit troublé d'un jeune Britannique de 13 ans, Jamie, mêlé à une affaire de meurtre d'une camarade de classe, Katie. Avec 96,7 millions de vues trois semaines après sa sortie, elle ne cesse d'attirer l'attention du public et des critiques. Mais qu'est-ce qui rend cette série aussi fascinante ?

La réussite de "Adolescence" repose en grande partie sur son format unique : chaque épisode est filmé en un seul plan-séquence. Cela signifie qu'aucun montage n'est effectué, permettant une immersion totale dans le récit d'une heure. La mise en scène audacieuse, réalisée par Philip Barantini en collaboration avec Jack Thorne et Stephen Graham, offre une expérience inédite. Barantini, connu pour son film "The Chef", a voulu rééditer cette technique pointue, déjà utilisée à l'époque des frères Lumière.

Dès les premiers instants, le spectateur est pris par la main pour vivre l'arrestation de Jamie à l'aube. La caméra danse sans interruption, emmenant le public dans une série d'événements intensément vécus, allant de l'interrogatoire policier aux répercussions familiales de ce drame.

Le défi du plan-séquence réside dans l’extrême précision exigée de tous les intervenants. "C'est une chorégraphie complexe", explique Frédéric Sojcher, professeur de cinéma. Les acteurs et techniciens doivent être en parfaite synchronisation en tout temps, car une seule erreur peut contraindre à tout recommencer. Chaque épisode a nécessité une semaine de tournage, ponctuée de trois semaines de répétitions. Lors de la première journée, une prise était filmée le matin et une autre l'après-midi, jusqu'à ce que la scène soit perfectionnée.

Les acteurs, pour leur part, doivent mémoriser l'intégralité de leurs répliques. Cette exigence est d'autant plus palpable dans le troisième épisode, où un long dialogue entre Jamie et sa psychologue doit être exécuté de manière fluide. Erin Doherty, qui incarne la psychologue, raconte comment le processus de répétition a été crucial, permettant à toute l'équipe de se glisser dans la peau de leurs personnages et de créer une atmosphère authentique. Certaines scènes ont été filmées jusqu'à seize fois pour capturer la magie parfaite.

Ce format envolé offre aux acteurs une opportunité d’interprétation unique, proche de la performance théâtrale. Nathalie Bittinger, maîtresse de conférences en cinéma, souligne que cette approche immersive crée une tension palpable, le public apprenant les événements en temps réel, sans flashbacks. "Cela permet de ressentir toute la sidération des parents et l'horreur de la situation", note-t-elle.

Au-delà de la prouesse technique, "Adolescence" aborde des thèmes essentiels. Elle s'inspire d'une réalité inquiétante : la violence et les meurtres impliquant des adolescents au Royaume-Uni, questionnant l'idéologie masculiniste et la misogynie croissante sur les plateformes en ligne. Dans ce contexte, la série ne se contente pas de divertir, elle dresse un tableau poignant et nécessaire de notre monde actuel.