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Nouveau gouvernement : Quel rôle pour le secrétariat d'État à l'Intelligence artificielle ?

2024-09-23

Révolution ou simple coup de communication ? Pour la première fois en France, le gouvernement a institué un poste spécifiquement dédié à l'Intelligence artificielle (IA) : le secrétariat d'État chargé de l'IA et du Numérique. Ce changement d'intitulé témoigne de l’importance croissante que l'exécutif accorde à ces technologies, en particulier aux IA génératives qui transforment déjà plusieurs secteurs.

Le Premier ministre, Michel Barnier, a nommé Clara Chappaz, une figure bien connue du monde des start-up, comme nouvelle responsable de ce secrétariat. Ancienne directrice de la mission French Tech, elle a pour ambition d'intégrer l'IA au cœur des actions gouvernementales. Mais quels impacts réels peut-on attendre de ce poste par rapport aux portefeuilles précédents ?

Une volonté de démocratiser l'IA

Lors de sa passation de pouvoir, Clara Chappaz a réaffirmé que l'IA sera centrale dans ses missions : "La France est dans la course mondiale de l'IA, et elle est reconnue à ce niveau. Nous ne devons pas relâcher nos efforts", a-t-elle déclaré. En tête de ses priorités se trouvent la formation et l'éducation autour de l'IA.

La France, réputée pour ses excellents parcours académiques dans ce domaine, doit veiller à conserver ses talents, souvent absorbés par des géants technologiques américains. "Nous devons continuer à former nos meilleurs ingénieurs et chercheurs et soutenir nos étudiants pour qu'ils soient prêts à intégrer le marché du travail avec des compétences pointues en IA", a insisté Chappaz.

Cette initiative ne doit pas seulement s'adresser aux professionnels, mais également au grand public. "Il est essentiel que tous les citoyens comprennent l'IA et ses enjeux pour pouvoir l'utiliser de manière éclairée. Cela constituera un atout pour l'avenir technologique de la France", a-t-elle souligné.

"L’IA ne doit pas devenir une nouvelle fracture sociale, ce combat sera ma priorité."

Clara Chappaz, secrétaire d'État à l'IA et au Numérique dans son discours

Elle a également mis l'accent sur la connexion entre le secteur public et le privé, ainsi que sur la nécessité d'encourager la diversité dans les technologies, particulièrement en matière de féminisation du secteur.

Des opinions partagées sur cette nomination

La création de ce poste ne fait pas l'unanimité dans la communauté de l'IA. Selon Gaël Varoquaux, chercheur à l'Inria, bien qu'il apprécie la mise en avant de l'IA, il craint que cela ne soit qu'un effet de mode. D’autres experts, comme Luc Julia, ancien directeur de Siri, s'interrogent sur le véritable message véhiculé par ce changement. "C'est du buzz !", déplore-t-il, souhaitant que ce nouveau titre ne se transforme pas en une simple opération marketing.

Cela dit, le profil de Clara Chappaz suscite des échos positifs dans le monde économique. "C'est une femme de terrain, avec une bonne connaissance de l'écosystème des start-up françaises", affirme Laurent Daudet, co-fondateur de LightOn. Son expérience en tant que leader de la mission French Tech lui a permis de nouer des liens précieux avec les entrepreneurs.

Cependant, un point soulevé avec inquiétude est que le secrétariat d'État est désormais rattaché au ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, et non plus à celui de l'Économie. Ce changement pourrait signifier une perte d'influence et de moyens pour ses missions. "Le pouvoir est plus à Bercy que rue Descartes", s'interroge Varoquaux, mettant en garde contre le risque d'affaiblissement du secrétariat à cause de ce transfert.

"C'est une très bonne chose d'avoir un leader compétent, néanmoins il faut voir si elle aura le poids politique pour exister réellement dans le paysage décisionnel."

Laurent Daudet, entrepreneur à franceinfo