Monde

Mali : la junte militaire frappée au cœur par une attaque spectaculaire – Libération

2024-09-20

Des images insoutenables de cadavres calcinés au milieu de ruines continuent d'apparaître sur les réseaux sociaux, suite à l'attaque meurtrière du 17 septembre qui a secoué Bamako, la capitale malienne, revendiquée par le Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans (GSIM), un groupe islamiste affilié à Al-Qaeda. Ce coup dévastateur porte un coup dur à la junte militaire dirigée par le colonel Assimi Goïta, au pouvoir depuis le coup d'État de 2020, qui avait été applaudie par des Maliens fatigués par des années de gouvernance inefficace et de crise sécuritaire.

Les militaires avaient officiellement renversé le président élu Ibrahim Boubacar Keïta pour stopper la spirale d'insécurité qui touche le Mali, un pays vaste comme deux fois la France. Cependant, cette récente attaque montre que la situation n'a guère changé. Malgré le soutien de la Russie et des mercenaires de l'ex-groupe Wagner, les forces maliennes semblent incapables de protéger la population.

La première frappe s'est déroulée à l'école de gendarmerie de Faladié, provoquant la terreur dans toute la ville. Les bilans préliminaires parlent de 77 à 81 décès, en opposition à la déclaration optimiste initiale de la junte, minimisant les pertes.

L'attaque s'est ensuite déplacée vers une base aérienne à proximité de l'aéroport international de Bamako, supposée être sous haute protection. Plusieurs avions ont été détruits, y compris ceux affrétés par des ONG qui apportent une aide cruciale dans ce pays déjà en proie à une grave crise humanitaire.

L'un des points forts de cette attaque a été la destruction du 737 présidentiel, un fait symbolique largement partagé sur les réseaux sociaux, soulignant ainsi le camouflet infligé à la junte. Deux jours auparavant, Goïta avait vanté les « succès » des forces de sécurité lors d'une célébration marquant le premier anniversaire de l'Alliance des États du Sahel, qui cherche à renforcer la coopération régionale anti-terroriste.

L'attaque, à la fois inédite et spectaculaire, pourrait également être un message fort des islamistes face à la démonstration de force malienne. « En attaquant des cibles stratégiques, les terroristes ont frappé le cœur même de la structure sécuritaire de Bamako », déclare l'analyste Mohamed Amara.

Alors que les autorités militaires avaient réussi à masquer leurs échecs de sécurité, cet événement met en lumière une escalade de violence. Les statistiques révèlent que les décès dus à des attaques terroristes ont presque doublé depuis l'arrivée des militaires au pouvoir : de 3 500 en 2020-2021 à plus de 6 600 en 2022-2023. En 2024, le Mali se classe parmi les quatre pays les plus touchés par le terrorisme, selon l'indice mondial du terrorisme.

Auparavant, la junte avait pu ignorer les attaques tant que Bamako restait épargnée. Toutefois, cette fois, la capitale, qui avait semble-t-il évité la spirale sécuritaire depuis des années, a été touchée. En 2015, l'attaque de l'hôtel Radisson Blu avait fait 27 morts. Les récents événements ouvrent une nouvelle ère d'angoisse pour les habitants de Bamako, déjà éprouvés par des années de militantisme préalable.

Parmi les victimes, des mercenaires russes qui avaient rencontré de lourdes pertes face aux rebelles touaregs en juillet dernier, soulignant davantage la fragilité de la situation sécuritaire au Mali.