« Les carnets de commandes des industriels révèlent une montée des tensions militaires en mer »
2024-11-04
Auteur: Marie
Les océans s'agitent… et avec eux, les ambitions militaires mondiales. Les marines militaires, tout comme les forces terrestres et aériennes, s’intensifient dans un contexte de réarmement global, qui a pris son essor depuis le milieu des années 2010 puis a été catalysé par le conflit russo-ukrainien. La plupart des nations revoient leurs capacités navales, et la France n'est pas en reste, avec un programme de modernisation sans précédent depuis les années 1990, comme l’indique Pierre Eric Pommellet, PDG de Naval Group et président du Groupement des industries de construction et activités navales (Gican). Ce dernier annonce avec enthousiasme l'événement Euronaval qui se tiendra à Villepinte du 4 au 7 novembre, réunissant industriels, militaires et experts du secteur.
Les acteurs de l'industrie navale examineront avec attention une variété d'équipements militaires, allant des navires de guerre classiques aux innovations technologiques de pointe. Parmi celles-ci, on trouve le canon électromagnétique antimissiles hypervéloces développé par l’Institut franco-allemand de recherche de Saint-Louis et le réseau de drones autonomes sous-marins de la société Arkeocean. Tandis que les grands groupes dominent encore le marché traditionnel, un nouvel élan est observé avec des PME développant des solutions novatrices dans un domaine autrefois fermé.
Le secteur naval industriel français, pourtant affaibli par les politiques de « dividendes de la paix », est en pleine renaissance. L'engouement et la préoccupation croissante pour la sécurité globale, exacerbées par les crises géopolitiques, ont redéfini le paysage stratégique. Avant les années 2010, la perception des menaces, notamment celle de la Russie, avait largement diminué, même pendant la guerre froide, où les flottes atlantiques n'avaient pas montré leur pleine capacité. Nicolas Mazzucchi, directeur de recherche au Centre d’études stratégiques de la marine (CESM), souligne que ces flottes retrouvent aujourd'hui leur rôle indispensable.
Cette embellie stratégique a malheureusement été suivie par la fermeture de nombreux chantiers navals et une réduction prononcée des flottes militaires. Le rapport parlementaire de 2022 révèle que la marine française est passée de 147 à seulement 80 vaisseaux depuis 1985, tandis que la marine américaine, l’US Navy, a vu sa flotte tomber à 271 navires de guerre, une situation qui la contraint à déléguer une partie de sa maintenance à des chantiers étrangers, notamment au Japon et en Corée du Sud. Cependant, cette contraction a été accompagnée d'une modernisation des équipements navals, car la puissance d’une flotte ne se mesure plus uniquement par son tonnage, mais également par son efficacité opérationnelle et technologique.
Nous assistons ainsi à un tournant important depuis le début des années 2010, avec le développement des nouvelles routes de la soie par Pékin en 2013, et des ambitions navales chinoises qui souhaiteraient s'étendre bien au-delà de la mer de Chine, visant à surpasser les États-Unis d’ici 2049, alors que la République populaire de Chine célébrera son centenaire.