Divertissement

« Emmanuelle » d'Audrey Diwan : un mélange de sensations entre érotisme et thriller qui déçoit

2024-09-25

Dans le contexte des années 1970, alors que la libération sexuelle battait son plein, le film « Emmanuelle » réalisé par Just Jaeckin a marqué les esprits en devenant un véritable phénomène culturel. Le film, qui a su séduire plus de 9 millions de spectateurs en France et 45 millions dans le monde, a ouvert la voie à une nouvelle ère du cinéma érotique, souvent nostalgique et empreint de glamour. Mais tout a changé depuis, et 50 ans plus tard, la question de l’érotisme dans le cinéma prend un tout nouveau tournant, comme l'illustre le travail d’Audrey Diwan dans son remake d’« Emmanuelle ».

Aujourd'hui, avec l'ombre du mouvement #MeToo, le défi de transformer l'icône de l'érotisme en une femme au pouvoir est de mise. Comment faire en sorte qu'Emmanuelle, autrefois réduite au statut d'objet, devienne une maîtresse de son propre désir et non simplement un personnage d’un drame sexuel traditionnel ? En se lançant dans cette entreprise, Diwan se heurte à de nombreux clichés, malgré le choix d'une distribution comme Noémie Merlant qui aurait pu, potentiellement, inverser les stéréotypes de genre en apportant une vision plus moderne et féministe de l'œuvre originale. Cependant, le scénario semble se perdre dans les mémoires d'un monde où il faut faire du surplace pour donner une image lisse de la femme moderne, soumise à une analyse trop académique des relations entre les sexes.

Emmanuelle est alors dépeinte comme une femme beaucoup plus active, riche et célibataire, qui navigue dans le monde des affaires et des plaisirs. Elle choisit ses conquêtes, mais se retrouve également piégée par des rôles de genre prévisibles, n’échappant pas aux manipulations de ses supérieurs masculins. Ce retournement de situation, censé être audacieux, finit par apparaître comme une réflexion peu convaincante sur la modernité et l’émancipation.

En ce qui concerne les scènes d’érotisme, Diwan essaie d'appliquer la formule du thriller à l’érotisme, où chaque acte sexuel est perçu comme une intrigue criminelle. Chaque moment intime est chargé de suspense, mais cet angle dévoile un manque de légèreté essentielle au véritable jeu érotique. La mise en scène, accompagnée d’une bande sonore pesante et d’un décor clinquant, donne l'impression que rien ne peut simplement exister pour le plaisir. Ce choix artistique, bien que potentiellement intéressant, manque l'essentiel : la capacité à prendre le risque de la légèreté, de la surprise, et de l'évasion que l'érotisme est censé offrir. En fin de compte, « Emmanuelle » semble plus immobilisé par son sérieux que libéré par son audace, plongeant ainsi le spectateur dans un univers où l’insouciance se voit reléguée à l’arrière-plan.