Dans le quartier de Port Richmond à Philadelphie, surnommé "la petite Pologne", la mémoire des immigrés d'Europe centrale est forte depuis le début du XXe siècle. Dans les épiceries et agences de voyage, la langue polonaise résonne souvent, témoignant de l'attachement des habitants à leur culture. Environ huit millions de citoyens américains revendiquent des origines polonaises, selon les données du Bureau national du recensement. À l’approche des élections présidentielles prévues le 5 novembre, les candidats redoublent d’efforts pour séduire cette communauté, particulièrement préoccupée par le conflit en Ukraine.

Lors du débat télévisé de septembre, Kamala Harris a fait preuve de ferveur en affirmant que si Donald Trump était réélu, la situation actuelle aurait été bien différente : "Poutine serait assis à Kiev, les yeux rivés sur l'Europe, en commençant par la Pologne". Cette déclaration a résonné profondément auprès des électeurs d’origine polonaise, qui voient la guerre en Ukraine non seulement comme un enjeu international mais aussi comme une question de sécurité personnelle et de stabilité régionale.

Katarzyna, propriétaire d'une épicerie, souligne l'importance de ce sujet en déclarant voter principalement sur la base des taxes douanières et du soutien à l'Ukraine. Selon elle, "nous avons besoin de leaders forts qui ne reculeront pas face à Poutine". Malgré les opinions divergentes au sein de la communauté, un courant se dessine où le soutien à l'Ukraine devient un élément central.

Les jeunes électeurs, comme Dylan et Paulina, expriment un intérêt limité pour la situation en Ukraine, mettant plutôt l’accent sur les problèmes locaux, tels que l'alcoolisme et le chômage rampant dans la région. Les discussions à ce sujet sont souvent teintées de frustration et de cynisme envers les promesses politiques.

La communauté polonaise reste toutefois active : récemment, des représentants de la communauté polono-américaine de Pennsylvanie ont lancé une lettre ouverte de soutien à Kamala Harris, mettant l’accent sur la nécessité d'une politique étrangère ferme face à la Russie. Des figures comme l’élu local Eddie Day Pashinski et des célébrités d’origine polonaise comme Christine Baranski ont été mobilisées pour sensibiliser les électeurs.

Wilkes-Barre, une ville historiquement axée sur l'industrie, a souffert de la désindustrialisation, avec une population vieillissante confrontée à des défis économiques croissants. Thomas Shubilla, président du Parti démocrate local, note que les préoccupations économiques dépassent souvent celles liées à la guerre en Ukraine. Il explique que la montée des fausses informations et des théories du complot est également un sujet de préoccupation pour les électeurs polonais, qui aspirent à une stabilité économique.

Les rumeurs selon lesquelles les républicains tentent de regagner les électeurs polonais ne cessent également de circuler, après un débat intense entre les deux camps pour les voix au sein de cette communauté cruciale. Alors que les démocrates insisteront sur les aides à la création d'emplois et aux allocations familiales, les républicains, eux, parient sur la popularité continue de Trump pour séduire cet électorat.

Dans ce contexte d'élections cruciales, la communauté polonaise de Pennsylvanie se trouve à la croisée des chemins, oscillant entre un passé d'immigration, un présent de défis et un avenir incertain, le tout sous l'ombre des conflits internationaux.