La Fondation Abbé Pierre traverse une tempête sans précédent après les graves accusations d'agressions sexuelles qui visent son fondateur, décédé en 2007. Suite à une enquête publiée en juillet, les dons de particuliers ont chuté de 30% à 33%, une situation alarmante signalée par Christophe Robert, délégué général de la fondation, dans une interview au Figaro. Alors que de nouvelles accusations ont fait surface début janvier et que le président de la Conférence des évêques de France réclame une enquête judiciaire, la Fondation redoute un impact sévère sur son action contre le mal-logement.

Les contributions privées constituent la moitié des ressources de l'association — notamment par le biais de legs, d'assurances-vie et de mécénat — et représentent à elles seules 97% des revenus. Heureusement, pour l'instant, le mécénat ne montre pas de signe de déclin. Cependant, pour ce qui est des legs, Christophe Robert met en garde : « Il va falloir anticiper de potentiels effets à moyen et long terme ». Ce contexte est d'autant plus préoccupant que la période de octobre à décembre est traditionnellement riche en dons, et la fondation a dû revoir son budget à la baisse alors que les besoins demeurent criants.

Un changement de nom en perspective

Face à cette crise, la Fondation Abbé Pierre envisage un changement de nom pour atténuer les répercussions négatives des accusations sur sa renommée. Ce processus, qui est en cours, avance lentement en raison des procédures administratives nécessaires pour une association reconnue d'utilité publique. Christophe Robert a indiqué que le changement devrait être effectif d'ici la fin du premier trimestre 2025. Pour marquer ce tournant, la fondation a cessé d'utiliser le logo de l'abbé Pierre et a entrepris des communications pour préparer le public à cette transformation, tout en réaffirmant son engagement dans la lutte contre le mal-logement.

Le prêtre, dont la mémoire est désormais ternie, fait face à 33 accusations énoncées dans un rapport du cabinet Egain, mandaté par Emmaüs, réseau dont fait partie la Fondation Abbé Pierre. Tarek Daher, délégué général d'Emmaüs France, a évoqué des signes de manipulation et de chantage, soulignant la nécessité de comprendre comment un silence aussi équivoque a pu perdurer si longtemps. Ce scandale a mis en lumière des comportements inacceptables qui entachent l'image d'une œuvre caritative longtemps respectée.

Face à la perte de confiance, les citoyens s'interrogent sur la pérennité de la Fondation et sur sa capacité à continuer de défendre les droits des plus vulnérables. La lutte contre le mal-logement et les personnes sans-abri doit-elle survire au poids d'un passé sombre ? La Fondation se trouve à un carrefour déterminant de son histoire, où chaque nouveau don est plus que jamais essentiel.