Dix ans après les attentats de 2015 contre « Charlie Hebdo » : l'évolution inquiétante de la liberté d'expression
2025-01-05
Auteur: Léa
Dix ans après le terrible attentat contre « Charlie Hebdo », la communauté des dessinateurs de presse continue de faire face à des défis inédits. Non seulement ils doivent composer avec une menace persistante, mais ils doivent également faire face à une indifférence croissante vis-à-vis de la liberté d'expression. Julie Besombes et Simon Baert, connus sous les pseudonymes Plop et KanKr, décrivent cette situation comme un « baromètre d'un pays devenu très fragile sur un certain nombre de sujets ». Leurs réflexions sont mises en avant dans des médias tels que « Sud Ouest Dimanche » et « Le Monde ».
Ils soulignent un paradoxe français moderne : bien que les lois de l'État protègent les artistes et les dessinateurs, c’est la société elle-même qui semble de moins en moins tolérante envers cette liberté d’expression. Plop et KanKr redoutent les conséquences d’une évolution qui pourrait devenir frileuse face aux critiques et à la provocation, éléments souvent présents dans leur travail.
Urbs, dessinateur attitré de « Sud Ouest » et du « Canard enchaîné », fait écho à ce constat en affirmant que rien n’a véritablement changé depuis l’attentat du 7 janvier 2015. Selon lui, la problématique semble s’aggraver, exacerbée par la mauvaise interprétation du travail des dessinateurs, notamment par le biais des réseaux sociaux. La réaction immédiate et mondiale à leurs œuvres les place dans une situation délicate, où le dialogue constructif est souvent remplacé par des réactions impulsives.
Ces artistes se retrouvent face à un dilemme : l’autocensure devient-elle leur pire ennemi ? Le climat actuel, où la peur de déplaire ou même de s’exposer à des représailles est omniprésent, les pousse à réfléchir davantage avant de publier. Urbs dénonce l’émergence de croyances extrêmes ainsi que l’instrumentalisation de leur art par des politiques qui exploitent la satire à des fins partisanes. La situation reste préoccupante, avec une tendance à la radicalisation parmi certains groupes politiques, en particulier à gauche, qui sapent la liberté artistique au lieu de la défendre.
D'un autre côté, malgré ces tensions, une certaine solidarité existe au sein de la profession. Plop et KanKr notent que, même face à l’adversité, leurs collègues font preuve d’un grand soutien mutuel. Bien qu’ils reçoivent des menaces, ils affirment ne pas avoir été victimes d’un lynchage médiatique à grande échelle, ce qui témoigne d’un certain degré de résilience dans les rangs des dessinateurs. En effet, chaque obstacle amène à une solidarité renforcée, et même un dessin raté peut susciter des réactions de soutien parmi les confrères.
L’impact de ces dix années de tension sur la liberté d’expression et le travail de la presse humoristique ne doit pas être sous-estimé. Le combat pour préserver un espace de création libre, même sous la menace, est plus pertinent que jamais. La question se pose donc : jusqu'où les artistes peuvent-ils aller pour défendre leur art sans craindre pour leur sécurité ? Dans un climat aussi hostile, le rôle de la satire et de la caricature est crucial, mais nécessite courage et détermination.