À Mayotte, après le chaos du cyclone Chido, la menace d'une épidémie de choléra s'intensifie
2024-12-24
Auteur: Michel
« J'ai besoin d'aide. » C'est dans un contexte de profonde détresse que Céline Lesburgueres, infirmière scolaire, interpelle les gendarmes lors de leur visite au collège de Majicavo, le samedi 21 décembre. Elle exprime une inquiétude pressante : « Je crains réellement un début d'épidémie que nous ne pourrons pas contrôler. » Depuis le passage dévastateur du cyclone Chido, ce collège abrite désormais 350 personnes vulnérables. Les conditions de vie, hélas, sont très précaires. « L'absence d'hygiène nous fait craindre le retour du choléra », avertit-elle. « Si le choléra revenait, que ferions-nous ? »
À travers l'archipel, la menace d'une résurgence du choléra pèse lourdement. Le cyclone a non seulement ravagé les infrastructures, mais a également annihilé les efforts de prévention mis en place par les autorités sanitaires. C'est un souvenir tragique qui hante les esprits : l'épidémie précédente avait causé la mort de cinq personnes et infecté plus de 200 autres quelques mois auparavant, selon l'Agence régionale de santé (ARS).
Une semaine après la catastrophe, les autorités tentent de rassurer. Selon la cellule interministérielle de crise, il n'y a « aucune alerte d'épidémie à ce jour ». Cependant, beaucoup restent sceptiques. Geneviève Darrieussecq, ancienne ministre de la Santé, admet une certaine inquiétude et souligne que l'État a constitué des réserves de vaccins contre le choléra.
« On ne peut plus se laver »
Dans les rues de Mamoudzou, les habitants partagent les mêmes craintes. « Nous avons très peur des maladies et du choléra. Comme il n’y a plus d’eau, nous ne pouvons plus nous laver », explique une jeune femme comorienne. Sa voisine, consciente des dangers, a pris des précautions : « J'interdis à mes enfants d’aller dans la rivière, mais je vois des gens qui s’y baignent, et certains boivent même l’eau directement. »
Les ruisseaux boueux regorgent d'enfants qui jouent, ignorant les dangers de contamination alors que le réseau d'eau potable est toujours hors service, malgré les promesses des autorités. Une situation catastrophique, surtout compte tenu que les bactéries du choléra, présentes dans les selles, peuvent contaminer les sources d'eau et se répandre rapidement.
Un hôpital de campagne et des vaccins en vue
« La promiscuité et le manque d'hygiène après une telle catastrophe constituent un terreau fertile pour le choléra », prévient Anthony Couret, médecin principal de l'hôpital de campagne en cours d'installation à Mamoudzou. À partir de mardi, jusqu’à 100 patients par jour pourront être accueillis dans des tentes de soin montées au milieu du stade de Cavani. Plus de 90 soignants et logisticiens travaillent déjà pour organiser cet hôpital modulaire, qui comprendra des urgences, une maternité, un laboratoire et deux blocs opératoires.
Une salle d'isolement sera également mise en place afin d'accueillir des patients présentant des symptômes de choléra, tels que diarrhées, vomissements et douleurs abdominales. « L'hôpital est bien équipé pour faire face à ce risque épidémique », déclare Jacques Pages, lieutenant-colonel à la sécurité civile.
Malgré ces efforts, tous les professionnels de santé s'accordent à dire que seule une amélioration significative des conditions d'hygiène, couplée au rétablissement de l'eau potable et de l'électricité sur l'île, pourra empêcher qu'une nouvelle catastrophe sanitaire ne vienne s'ajouter à la tragédie causée par le cyclone Chido.