Les sciences sociales, à l'heure actuelle, sont-elles perdues dans l’hyper-spécialisation de leur domaine ? C'est une question perspicace qui a poussé Bernard Lahire à publier, en 2023, un ouvrage audacieux intitulé *Structures fondamentales des sociétés humaines*. Cet ouvrage a provoqué des débats intenses au sein de la sociologie et au-delà, appelant à une interdisciplinarité accrue et à la recherche d'invariants pour mieux appréhender les nuances de la vie sociale.

Pour approfondir cette réflexion déjà controversée, Lahire a récemment sorti *Sciences sociales du vivant* aux éditions La Découverte. Dans ce livre, il propose une reconfiguration des sciences sociales en les reliant étroitement à l'ensemble du vivant. Il soulève des questions cruciales sur la place de l'humanité parmi d'autres espèces et cherche à établir des lois ou des invariants qui expliquent non seulement les structures sociales humaines, mais également leurs particularités dans le grand ordre de la nature.

Avec ce nouvel ouvrage, Lahire entend poursuivre le "moment de rupture" qu’il a amorcé avec *Structures fondamentales des sociétés humaines*. Quelles sont les implications de cette rupture pour les sciences sociales ? Doit-elle être accompagnée d'une refonte méthodologique ? La focalisation accrue sur le vivant doit-elle se faire au détriment de l'élargissement et de la spécialisation des objets d'étude en sciences sociales ? Ces interrogations sont d'une importance capitale, alors que le monde fait face à des défis sociétaux croissants comme le changement climatique et la crise de la biodiversité.

Lahire invite à considérer l'humanité non pas comme une entité isolée mais comme partie intégrante d'un réseau plus vaste de vie. Cela pourrait bien être la clé pour comprendre les crises auxquelles nous faisons face aujourd'hui et redéfinir notre rapport à notre environnement. Ce débat est plus que jamais d'actualité et pourrait déterminer l'avenir des sciences sociales dans un monde où les limites entre les disciplines deviennent floues.