TÉMOIGNAGE : "Cela m'a replongée dans un passé violent". Le film Signalements raconte la lutte de Laurence pour sa nièce, agressée plus de 300 fois
2024-11-14
Auteur: Louis
À l'occasion de la Journée des droits de l'enfant le 20 novembre, France 2 diffusera "Signalements", un film inspiré de l'histoire bouleversante de Karine et de Laurence Brunet-Jambu. Ce film dépeint le combat acharné d'une tante pour sauver sa nièce, victime de maltraitances infligées par ses parents et de violences sexuelles perpétrées par un ami de la famille. Adapté de leur livre éponyme, ce récit poignant est à la fois un cri du cœur pour la petite fille martyrisée et un appel urgent à la protection des enfants.
Sur la couverture du livre, une photo d'une fillette dans les bras du Père Noël contraste avec son visage tristement absent, ses yeux semblant crier à l'aide.
Des années de souffrances
Karine, née en 1997 à Rennes, a dès sa naissance suscité l'inquiétude de sa tante, Laurence. Cette dernière a rapidement constaté le désintérêt de la mère pour l'enfant, incapable de lui donner l'affection dont elle avait besoin. Laurence témoigne que sa sœur ne parvenait pas à prendre sa fille dans ses bras ni à lui offrir les soins élémentaires.
Dans leur livre, Laurence narre un moment clé où la mère a révélé son incapacité à s'occuper de Karine, admettant avoir tué une précédente fille, un aveu glaçant. À l'âge de deux ans, Karine était souvent retrouvée endormie sur le seuil de la porte, négligeant les dangers de la rue. À cinq ans, elle errait parfois seule, livrée à elle-même bien après la tombée de la nuit.
Les signalements ignorés
Malgré un signalement fait aux services sociaux dès les premiers jours de sa vie, la situation de Karine s'est détériorée. En 2002, un ami des parents, un ancien détenu pour agression sexuelle, a été accueilli chez eux. Armé de promesses d'argent pour leurs courses, ils ont laissé cet homme abuser de Karine, lui ordonnant de garder le silence. Karine raconte : "Il venait me chercher dans mon lit pour me conduire dans la salle à manger où il dormait. J'avais tellement peur..."
Avec plus de 14 signalements à son actif, Laurence a alerté les autorités, mais ces plaintes ont été systématiquement classées sans suite. Elle a même été accusée de dénonciation calomnieuse. Ce n'est que par un miracle que Karine a finalement été retirée de son foyer où elle avait déjà été agressée plus de 300 fois.
Justice tardive
En juillet 2018, son agresseur a été condamné à 30 ans de prison, tandis que ses parents ont également été condamnés pour leur complicité.
Laurence et Karine, désireuses de transformer leur douloureuse expérience, ont écrit le livre "Signalements" et il a suscité un vif intérêt pour une adaptation cinématographique. Le film, supervisé par des réalisateurs chevronnés, reflète fidèlement leur histoire alors que Laurence a assisté au tournage, confrontée à des souvenirs douloureux. Elle affirme : "Ça collait exactement. C'était moi. C'était Karine. C'était ma belle-sœur."
Un film pour éveiller les consciences
Laurence espère que le film saura sensibiliser le public et fera bouger les choses. Elle rappelle que 160 000 enfants subissent des violences sexuelles chaque année en France, un chiffre alarmant. Elle déplore que les victimes ne bénéficient pas d'une protection suffisante, soulignant que malgré des plans annoncés, ces mesures restent largement inefficaces.
Elle réitère son constat : "Les enfants ne sont pas mieux protégés qu'il y a dix ans. Je reçois encore des appels d'enfants vivant la même horreur que Karine aujourd'hui."
Laurence, aujourd'hui présidente d'une association dédiée à la défense des droits des enfants, appelle à une véritable réforme du système d'aide sociale à l'enfance, pour qu'il puisse répondre aux défis contemporains.
Sa voix, empreinte de détermination, porte un message d'espoir : "Karine mérite des excuses de la part des institutions pour ne pas l'avoir protégée. Chaque enfant qui souffre est une responsabilité collective. Tous ensemble, nous devons faire en sorte que cela change." Elle conclut avec une note d'optimisme, espérant que le film incitera à la réflexion et à l'action, afin qu'aucun enfant ne doive jamais traverser une épreuve similaire.