
"Sauvons les Kevin" sur Paris Première : Pourquoi ce prénom est-il si stigmatisé ?
2025-03-21
Auteur: Léa
Cela peut sembler léger, mais avez-vous déjà considéré la souffrance que ressentent les Kévin ? Kévin Fafournoux, lui-même sujet aux moqueries liées à son prénom, en fait une expérience personnelle qu'il partage dans son documentaire "Sauvons les Kévin", diffusé sur Paris Première le 22 mars.
Même s'il ne porte ni mulet ni casquette à l'envers, Kévin met en lumière, à travers les nombreux témoignages dans son film, la difficulté de se défaire des stéréotypes associés à son prénom : "beauf", "dragueur" ou même "geek". Le réalisateur explique que ce prénom souffre d'une image tellement ancrée dans les esprits qu'il devient difficile pour ceux qui le portent de s'en dissocier. "Les gens peuvent être polis et ne pas exprimer ouvertement leurs jugements, mais je sais qu'ils les formulent en silence, et c'est cela qui est lourd à porter", confie-t-il. Son documentaire ne se limite pas à la France ; ce phénomène est également présent en Belgique, au Québec, et même en Allemagne, où le terme "Kévinisme" a été inventé. Il s'agit là d'une vision biaisée qui considère les prénoms comme Kevin comme des indicateurs de classe sociale méprisables.
Ce phénomène de nomination n'est pas anodin. Kévin a été le prénom masculin le plus attribué en France entre 1990 et 1994, popularisé par des figures comme Kevin Costner, ainsi que par des films cultes tels que "Maman, j'ai raté l'avion" et des séries américaines comme "Beverly Hills" qui ont largement alimenté la culture populaire. Tout cela a contribué à ce qu'il résonne auprès de nombreuses personnes, simplifiant ainsi la création de blagues autour de ce prénom.
Le documentaire s'affirme également comme un travail de recherche approfondi où Kévin Fafournoux a échangé avec des sociologues, des psychologues et des chercheurs pour analyser les racines de cette stigmatisation. La conclusion est sans appel : c'est un racisme de classe. "C'est un déni de l'ascension sociale des classes populaires qui a été mal perçu dans les années 90, conduisant à une stigmatisation persistante", souligne le réalisateur.
Cette problématique est également intrinsèquement liée à l'opposition entre Paris et les régions. Un fait que Jordan Bardella a exploité en soulignant qu'il a fait élire "deux Kévin" à l'Assemblée nationale, mettant en lumière le lien entre ce prénom et une classe sociale plus populaire, qui représente probablement une frange électorale du Rassemblement National.
En parallèle, en étudiant les taux de réussite au baccalauréat, la situation devient plus préoccupante. Un Kévin obtient seulement 5 % de mentions très bien, contre 17 % pour un Augustin, ce qui soulève la question cruciale du déterminisme social.
Kévin Fafournoux appelle à une réelle prise de conscience collective, en insistant sur le fait que le prénom est un marqueur social vital qui devrait être reconnu par l'État comme un critère de discrimination. Il s'inquiète que les discriminations basées sur les prénoms soient déjà reconnues dans d'autres pays, mais restent ignorées en France.