Technologie

Les start-up d'IA : Entre ambitions démesurées et pressions financières croissantes

2024-09-18

En août dernier, Google a frappé un grand coup en recrutant des dirigeants et des ingénieurs de la start-up d’intelligence artificielle (IA) Character AI. Le mois précédent, Amazon avait également intégré des talents d’Adept AI. Microsoft, quant à lui, a créé la surprise en mars en prenant une partie de l’équipe d’Inflection AI, incluant son cofondateur Mustafa Suleyman, un ancien de DeepMind. Cette entreprise, fondée seulement deux ans plus tôt pour rivaliser avec le célèbre robot conversationnel ChatGPT, était valorisée à 4 milliards de dollars (3,6 milliards d'euros) après avoir levé 1,3 milliard de capitaux. Ces mouvements ont mis en lumière la pression économique croissante pesant sur les jeunes pousses de l’IA, tant aux États-Unis qu’en Europe, après une période euphorique.

Clément Delangue, cofondateur de Hugging Face, a souligné cette tendance en signalant que de nombreuses start-up d’IA, dépensant massivement, n’avaient souvent qu’un à deux ans de marge avant de devoir lever davantage de fonds. En 2024, une attention accrue sera portée à la rentabilité des entreprises du secteur. Delangue a même révélé qu’il est contacté chaque semaine par une dizaine de start-up cherchant à être rachetées, ce qui témoigne bien des difficultés financières croissantes.

Cependant, ces start-up sont également confrontées à des soupçons d’une bulle spéculative dans le domaine de l’IA générative, qui génère et traite des contenus variés comme des textes, des images ou des sons. En juin, Goldman Sachs a lancé un avertissement : "IA générative : trop de dépenses pour trop peu de bénéfices ?" Les coûts exorbitants des calculs nécessaires à l’entraînement des IA, associés aux erreurs persistantes dans leurs résultats, soulèvent des doutes sur la viabilité du déploiement de ces technologies au sein des entreprises.

Les start-up, créatrices de modèles ou de services d’IA, doivent naviguer dans un environnement dominé par des géants du numérique, à la fois partenaires et concurrents. Ces géants, par l’intermédiaire de leurs divisions cloud, fournissent non seulement des capacités de calcul aux jeunes entreprises, mais aussi la distribution de leurs modèles. De plus, Google, Microsoft et Meta intègrent désormais des assistants IA sur leurs propres plates-formes, des smartphones aux moteurs de recherche en passant par les réseaux sociaux.

Même la société à l’origine de ChatGPT, pionnière du secteur, fait l’objet de critiques. Ed Zitron, un communicant et essayiste, a récemment provoqué en demandant en ligne : "Comment OpenAI peut-elle survivre ?" Malgré un doublement de ses revenus pour atteindre plus de 3 milliards de dollars par an, OpenAI se retrouve avec un déficit de 5 milliards, en grande partie à cause des coûts informatiques exorbitants versés à son partenaire Microsoft, qui a déjà investi 13 milliards dans l'entreprise. À l’heure où OpenAI chercherait à lever plus de 5 milliards de dollars supplémentaires, sa valorisation pourrait atteindre des sommets de 150 milliards de dollars, attisant ainsi les interrogations sur la durabilité de ce modèle économique.

Les experts s'interrogent : les start-up d'IA peuvent-elles réellement réussir à s'imposer dans un marché si concurrentiel et à forte pression financière, ou assistons-nous à l'effondrement d'un rêve technologique ?