
« Je reste debout, je ne me laisserai jamais faire » : le maire d'Istanbul, Ekrem Imamoglu, emprisonné pour « corruption » au milieu des manifestations – Libération
2025-03-23
Auteur: Pierre
Les manifestations de masse n'ont pas eu l'effet escompté. Le dimanche 23 mars, un juge a ordonné l'incarcération du maire d'opposition d'Istanbul, Ekrem Imamoglu, accusé de « corruption ». Son arrestation survenue mercredi a suscité une vaste onde de contestation à travers toute la Turquie, comme l'a annoncé l'un de ses avocats. Le ministère turc de l’Intérieur a aussi confirmé que l’édile avait été « suspendu de ses fonctions ». Néanmoins, une demande d'incarcération pour « terrorisme » a été rejetée par la justice, selon des sources de l'AFP.
« Exécution sans procès »
Ekrem Imamoglu a été conduit à la prison de Silivri, à l'ouest d'Istanbul, avec plusieurs co-accusés. Son équipe juridique a déjà annoncé son intention de contester cette incarcération. Dans un message transmis par ses avocats, il a dénoncé un processus judiciaire qu'il qualifie de « véritable exécution sans procès », appelant la nation à se lever contre cette injustice. « Je reste debout, je ne me laisserai jamais faire » a-t-il affirmé dans un message sur X, réitérant un slogan qu'il avait popularisé en 2019, lorsque son élection avait été annulée avant d’être finalement confirmée lors d’un second scrutin.
Le samedi soir, Imamoglu a été amené avec 90 de ses co-accusés dans le palais de justice de Caglayan, sous une forte protection policière. Des manifestations ont eu lieu devant la mairie d'Istanbul, rassemblant des dizaines de milliers de personnes, dont beaucoup ont passé la nuit dans les lieux pour soutenir le maire face aux accusations qu'il qualifie d'« immorales et sans fondement ». Les forces de l'ordre ont tenté d'isoler les protestataires en interdisant les rassemblements jusqu'à mercredi.
Les craintes d'un remplacement
L'accusation de « soutien à une organisation terroriste » vis-à-vis d'Ekrem Imamoglu a suscité des inquiétudes parmi ses partisans, qui craignent qu'il ne soit remplacé par un administrateur d'État si son incarcération devait durer. Le climat de tension rappelle les événements tragiques des manifestations de Gezi en 2013, quand des millions de Turcs s’élevèrent contre le gouvernement. Ces nouvelles manifestations, qui ont éclaté dans au moins 55 des 81 provinces turques, signalent une vague de mécontentement sans précédent.
Les autorités ont arrêté des centaines de manifestants dans au moins neuf villes différentes, selon les rapports.
Imamoglu, devenu le principal adversaire du président Recep Tayyip Erdogan, représente le Parti républicain du peuple (CHP), principal parti d’opposition. Âgé de 53 ans, il est considéré comme la bête noire du président, ayant remporté Istanbul en 2019 au détriment du Parti de la justice et du développement (AKP) qui dominait la ville depuis un quart de siècle. Il devait initialement participer à sa nomination comme candidat à la présidence prévue pour 2028 lors d'une assemblée de son parti. Malgré la situation, le CHP maintient cette primaire, invitant tous les citoyens à participer, qu'ils soient membres ou non.