Indignation à la Cinémathèque française : La projection de « Le Dernier Tango à Paris » de Bertolucci provoque une onde de choc
2024-12-13
Auteur: Pierre
La Cinémathèque française se retrouve au cœur d'une vaste controverse. Ce dimanche soir, l'institution prévoit de projeter Le Dernier Tango à Paris de Bernardo Bertolucci, dans le cadre d'une rétrospective dédiée à l'iconique Marlon Brando. Sorti en 1972, ce film controversé explore la liaison tumultueuse entre une jeune femme et un homme d'âge mûr, et il est tristement célèbre pour une scène de viol extremement choquante.
Cette séquence, ajoutée à la dernière minute pendant le tournage, a été particulièrement traumatisante pour Maria Schneider, âgée de seulement 19 ans à l'époque, tandis que Marlon Brando en avait 48. Il est important de noter que l'actrice n'a pas été alertée par le réalisateur au sujet de cette scène, ce qui a fait de ce tournage une expérience traumatique dont elle a avoué ne jamais s'être remise.
Le magazine Télérama a rapporté que "Difficile aujourd'hui de regarder sans ciller ces quelques minutes d'abus non simulé. L'infraction est à l'écran : Maria Schneider, humiliée, subit, sous nos yeux et pour de vrai, une agression sexuelle caractérisée." Cette indignation a poussé plusieurs journalistes et organisations féministes à critiquer la Cinémathèque pour sa décision de projeter ce film sans offrir de contexte pédagogique ou de médiation.
Des voix s'élèvent pour demander un apport contextuel
Bien que le traumatisme de Maria Schneider soit mentionné dans le cadre du cycle Brando, il n'est pas évoqué dans la description de la projection. "Cinquante ans après sa sortie, le film conserve la même odeur de soufre, tandis que la passion dévastatrice d'un couple d'inconnus interroge les rapports entre le sexe et la société", peut-on lire sur le site officiel de la Cinémathèque.
En réaction à cela, la journaliste Chloé Thibaud, auteure de l'ouvrage Désirer la violence : ce (eux) que la pop culture nous apprend à aimer, a affirmé : "Non, cinquante ans après sa sortie, ce film n’a qu’une seule et même odeur : la culture du viol." Elle a exprimé sa déception sur Instagram, déclarant que projeter le film sans prévoir un apport contextuel est une véritable honte.
Thibaud plaide pour une "culture du contexte" au lieu d'une "culture de l'annulation", suggérant que la Cinémathèque organise une conférence en amont de la projection ou une discussion après le film, pour permettre un échange enrichissant sur le sujet douloureux du viol.
De nombreuses personnalités, dont l'actrice et réalisatrice Ariane Labed ainsi que des associations féministes comme MeTooMedia et NousToutes, ont également exprimé leur indignation face à cette décision.
Un temps d’échange avec le public programmé
Jean-François Rauger, le directeur de la programmation de la Cinémathèque, a été contacté par Télérama et a répondu aux critiques en rappelant que "Les conditions de tournage de la scène incriminée sont connues. Bertolucci n’a rien communiqué à son actrice pour qu’elle puisse exprimer des émotions authentiques. Il ne fait aucun doute que cela constitue un viol symbolique et psychologique !" D'ailleurs, il a également noté que Marlon Brando se sentirait lui aussi violé par Bertolucci, arrêté de lui parler pendant des années après le tournage.
Rauger défend Le Dernier Tango à Paris comme un "chef-d'œuvre qui explore la relation complexe entre le réalisateur et l'interprète". Néanmoins, concernant les exigences d'un soutien pédagogique autour de la scène de viol, il a commenté que "la Cinémathèque est un musée qui expose des œuvres d'art, non un ciné-club où l'on débattrait de phénomènes de société lors de la projection d'un film".
Face à cette controverse, un "temps d'échange avec le public" sera programmé après la projection, afin de permettre des discussions essentielles sur les thèmes abordés par le film, même si cela n'efface pas la douleur inhérente à cette œuvre.
La polémique autour de la projection de ce film emblématique soulève des questions cruciales concernant la représentation de la violence dans le cinéma et la responsabilité des institutions culturelles face à des œuvres controversées.