Santé

Explosion des cas de cancer du pancréas : "Il y a toujours de l’espoir" selon Fabienne Portales, oncologue à l'ICM

2024-11-16

Auteur: Sophie

Fabienne Portales, oncologue spécialisée dans le cancer du pancréas et récemment élue présidente de la Commission médicale d’établissement de l’ICM, parle des inquiétudes croissantes entourant cette maladie. Diplômée en pharmacie, elle a décidé de se tourner vers la médecine par passion pour le contact humain.

Les nouvelles statistiques concernant le cancer du pancréas sont alarmantes.

Avec 16 000 nouveaux cas recensés en 2023, la compréhension d'une telle augmentation est cruciale. Les chiffres sont troublants : une hausse de 300 % des cas, principalement liés à l'adénocarcinome qui représente 90 % des diagnostics. Cette montée est inquiétante, surtout en raison de l'âge de plus en plus jeune des patients, en particulier chez les femmes qui subissent une hausse de 3,3 % des cas chaque année, contre 2,3 % pour les hommes.

Une véritable épidémie de cancer.

Ce cancer représente un défi de santé publique. Bien que le vieillissement et l'augmentation de la population expliquent une partie de cette hausse, il reste 130 % de cas dont les causes demeurent inconnues. Il est impératif de mieux identifier les facteurs de risque.

Quel est le principal facteur de risque dans cette maladie ?

Le tabac est de loin le facteur le plus significatif. D'autres éléments comme les pancréatites chroniques calcifiantes, l'obésité et le diabète sont également cités. Cependant, leur rôle exact demeure incertain, car le diabète peut être à la fois une cause et une conséquence du cancer. Environ 10 % des patients présentent une mutation génétique qui augmente leur risque de développer un cancer du pancréas, ce qui incite les médecins à recommander des consultations génétiques pour ceux ayant des antécédents familiaux de certains cancers.

Le pronostic reste préoccupant.

La survie à cinq ans des patients est de seulement 7 % en moyenne. Toutefois, pour les cancers opérables, cette survie peut atteindre 20 %. Les récents progrès en matière de traitement, comme l'usage du protocole Folfirinox, combinant chirurgie et chimiothérapie pendant six mois, ont montré une amélioration significative, la médiane de survie ayant augmenté de 22 mois à 54,5 mois. Le taux de réponse au traitement est également passé de 8 % à 30 %.

Avancées majeures et obstacles.

Cela marque une avancée majeure depuis l'introduction de la gemcitabine en 1985. Cependant, la complexité liée à la résistance des tumeurs aux traitements demeure un obstacle majeur.

Défis liés au diagnostic.

Une autre difficulté réside dans le fait que le cancer du pancréas est souvent diagnostiqué trop tard. Les symptômes tels que douleurs abdominales ou dorsales peuvent être attribués à des pathologies moins graves, entraînant des retards dans la détection. Les techniques de dépistage précoce, tant sanguines que génétiques, sont encore en cours de perfectionnement.

L'immunothérapie n'est pas efficace.

Non, à ce jour, elle ne semble pas efficace pour le cancer du pancréas.

L'importance de la prise en charge globale.

Absolument ! L'approche multidisciplinaire est primordiale, surtout dans un contexte où le système de santé souffre de lacunes. L’entretien nutritionnel est crucial ; les études montrent que des soins adaptés peuvent offrir un meilleur pronostic. Le soutien psychologique, la kinésithérapie et d'autres formes de traitements auxiliaires jouent également un rôle essentiel dans l'amélioration de la qualité de vie des patients.

Démystification et espoir.

Oui, je conseille à mes patients d'ignorer les informations non vérifiées qu'ils peuvent trouver sur internet. Chaque patient n'est pas un numéro, il a une histoire, et ensemble nous combattons la maladie.

Certains patients vivent des parcours inspirants. Récemment, l'une d'elles, âgée de 87 ans, a été opérée avec succès il y a deux ans et se porte bien. Ces récits, bien qu'isolés, soulignent qu'il y a encore de l'espoir dans la recherche et les traitements.

Les statistiques nous aident à adapter nos traitements, mais au niveau individuel, chaque cas est unique.