Alors que Radio France se prépare pour les événements de Médias en Seine, une question cruciale émane : comment les médias français, notamment les radios et les journaux, intègrent-ils l'intelligence artificielle (IA) dans leur travail quotidien ? Si les possibilités offertes par cette technologie sont impressionnantes, il est essentiel de procéder avec prudence, en instaurant des garde-fous pour éviter tout abus.

D'innombrables outils ont été développés récemment, certains d'entre eux étant réellement déroutants. Par exemple, on peut désormais cloner des voix avec une telle fidélité qu'il devient difficile de distinguer la réalité de la fiction, ce qui pourrait induire les auditeurs en erreur. Toutefois, ce n'est pas ainsi que fonctionne franceinfo, qui s'engage à diffuser uniquement des voix réelles, enregistrées par des humains.

L'utilisation d'une IA comme animatrice n'est pas l'exception, mais une pratique qui suscite des interrogations. Aux États-Unis, la station de radio Live 95.5 à Portland a utilisé une telle technologie pour créer une version IA de l'une de ses présentatrices, Ashley. Cette dernière alterne entre le micro et une synthèse vocale IA, ce qui permet d’optimiser son efficacité dans son travail. Mais cette approche semble poser des dilemmes éthiques, en soulevant la question de la véracité et de l’authenticité de l’information transmise au public.

Dans le paysage plus complexe des médias entièrement alimentés par IA, un exemple est l'application FYI lancée par Will.i.am. Cette application thématique génère des nouvelles à partir d'agrégations d'informations trouvées sur Internet, mais cela soulève des inquiétudes concernant la vérification des faits et la fiabilité des sources, en particulier dans un monde où la désinformation peut se propager rapidement.

À Radio France, l’utilisation de l’IA est davantage axée sur l’assistance, et non le remplacement. Les journalistes utilisent des outils d’IA pour optimiser leurs tâches : correcteurs orthographiques, logiciels de retranscription d'interview, qui viennent soutenir leur travail. Benoît Georges, journaliste aux Echos, souligne que ces outils sont des aides pour simplifier le processus, et non des substituts à l’écriture humaine.

Il est vital de veiller à ce que l'IA reste sous contrôle humain. Violaine Degas, cheffe du numérique aux Echos, insiste sur l'importance d'un œil humain pour superviser la production de contenu assisté par l’IA. Cela s'avère d'autant plus nécessaire que les défauts de la technologie, tels que des erreurs de formulation ou des informations inventées, peuvent se produire, rendant l'approche encore plus précaire.

En dépit des craintes liées à la montée de contenus générés par IA, cet environnement pourrait, paradoxalement, ramener les lecteurs vers des médias traditionnels. Comme le note Benoît Georges, la qualité perçue de l'information pourrait susciter une nostalgie pour le journalisme traditionnel, qui garantit rigueur et déontologie face à une mer de contenus de faible valeur apparente.

Le groupe Ouest France adopte une approche prudente, évitant l'utilisation d'images générées par IA pour illustrer des articles. David Dieudonné, qui supervise les projets, rappelle que fournir des informations précises et authentiques est primordial dans l’établissement d’un lien de confiance avec le public.

Enfin, les médias français et notamment Radio France ne cessent d'expérimenter pour intégrer l'IA de manière responsable et éthique. Matthieu Beauval, directeur de l'innovation, évoque les nombreux protocoles mis en place pour évaluer les outils nouvellement développés. L'engagement reste de conjuguer innovation avec des principes de vérification et de responsabilité pour garantir que les médias restent des piliers de confiance dans une époque où l'information est plus facilement accessible mais parfois trompeuse.

Cette évolution judicieuse vers l'intégration d'IA pourrait bien marquer une nouvelle ère pour le journalisme, plaçant un enjeu crucial autour de la véracité et de l'intégrité de l'information dans un monde numérique en pleine transformation.