« En situation de détresse » : À Bordeaux, un centre d'expertise pour soutenir les enfants atteints de TDAH
2024-11-11
Auteur: Emma
Imaginez un petit garçon de 3 ans, en pleine effervescence, qui gigote, saute, court et peine à rester assis. Son regard curieux se porte sans cesse sur tout ce qui l'entoure. C'est un enfant, certes, mais aussi un enfant qui lutte avec son attention – un comportement courant chez ceux qui présentent un trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH).
Nous nous trouvons à l’unité spécialisée du Centre de référence des déficits de l’attention et hyperactivité (Credah) à l’hôpital Charles-Perrens à Bordeaux. Ce centre reçoit chaque année environ 750 nouvelles consultations en Gironde pour des enfants de 0 à 6 ans montrant des signes de troubles du neurodéveloppement. En France, environ 3 à 5 % des enfants sont touchés par le TDAH, ce qui représente jusqu'à deux enfants par classe. La réalité est encore plus préoccupante : environ 3 % des adultes sont également concernés, souvent sans diagnostic, ce qui complique encore leur vie quotidienne.
Le professeur Manuel Bouvard, pédopsychiatre à la tête du pôle psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, souligne que le nombre de cas pourrait être sous-estimé dans certaines régions moins bien dotées en ressources.
« Depuis le XIXe siècle, on a décrit des troubles de l’attention, mais l’appellation de TDAH n’a été adoptée que dans les années 1980. L’école reflète souvent ces difficultés, mais de nombreux parents sont les premiers à s’en rendre compte. Ils constatent que leurs enfants ont de la peine à se concentrer et à suivre des instructions. La souffrance est palpable – non seulement chez les enfants victimes de malentendus et de sanctions à l'école, mais également chez les parents épuisés et les enseignants souvent dans l'incertitude.Prendre en charge les familles est crucial.
Le Credah est le premier et unique centre de ce genre en France depuis 2016. Il est dirigé par la docteure Erica Martins, qui supervise une équipe pluridisciplinaire composée d'infirmiers, d'orthophonistes, d'ergothérapeutes et de psychologues. « Nous traitons ici des cas complexes envoyés par des médecins généralistes et des pédiatres, principalement des enfants, mais aussi des adolescents et des adultes. Nous jouons un rôle de soutien pour les équipes médicales dans d'autres départements, en évaluant des situations et en formant des groupes d’éducation thérapeutique », explique la docteure Martins.
Les avancées dans la compréhension du TDAH permettent aujourd'hui aux équipes d’élaborer des stratégies qui mettent l’accent sur les forces des patients, en plus de leurs défis. « En s'appuyant sur leurs capacités, nous pouvons leur proposer des réponses sociales adaptées », ajoute-t-elle. Tous les six mois, les projets de soins sont revus, y compris des sessions d’affirmation de soi, riches pour les enfants.
Les parents, également en détresse, sont intégrés à ce processus à travers des programmes d'entraînement aux compétences parentales. « Ils se sentent souvent en échec et nous devons les soutenir pour qu'ils puissent trouver un équilibre dans leur vie et restaurer une bonne image d'eux-mêmes », souligne la docteure Martins.
Le professeur Bouvard avertit aussi que la situation de santé mentale en France est alarmante. Dans plusieurs départements, notamment la Corrèze et la Creuse, il n'existe plus de pédopsychiatres disponibles. L'absence de soins adéquats pendant les vacances scolaires peut rendre la situation critique. Il insiste : « Nous devons former davantage de professionnels pour répondre à ces enjeux de santé publique qui touchent de nombreuses familles.
En somme, si le centre de Bordeaux agit remarquablement pour soigner les enfants et soutenir les parents, il reste crucial de renforcer l’offre de soins et de prévention dans toute la France. C'est un défi à relever, car chaque enfant mérite une chance de s'épanouir.