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« En Inde, la tragédie d'une jeune comptable soulève un débat crucial sur la 'culture toxique du travail' »

2024-09-26

Auteur: Chloé

Anna Sebastian Perayil, une jeune comptable de seulement 26 ans, a perdu la vie de manière soudaine le 20 juillet à Pune, une métropole située à l'ouest de l'Inde. Anna travaillait pour le géant de l’audit EY, et sa mère affirme sans l'ombre d'un doute que la pression exercée au travail a été la cause de ce drame. Elle a partagé sur les réseaux sociaux des témoignages poignants sur la réalité éprouvante de son emploi, décrivant des journées interminables et un stress intense. Dans une lettre adressée à l’entreprise, elle dénonce une « culture qui glorifie le surtravail », précisant que les objectifs irréalistes imposés aux employés ont conduit à la perte de sa fille.

Cet événement tragique a provoqué un réveil national sur les conditions de travail tendues qui touchent particulièrement les jeunes professionnels en Inde. Après une vague de témoignages sur les réseaux sociaux, l'administration locale du travail a ouvert une enquête sur les pratiques au sein d'EY.

Cependant, la réaction n'a pas été unanime. Plusieurs dirigeants d'entreprises indiennes, comme Narayana Murthy d'Infosys, ont minimisé la portée des responsabilités de l'entreprise en affirmant que les jeunes devraient s'engager à travailler jusqu'à soixante-dix heures par semaine pour stimuler l'économie. Bhavish Aggarwal, le PDG d'Ola, a également ajouté que si l'on aime son travail, ce dernier devrait apporter du bonheur.

Cette position n'est pas représentative des expériences des employés indiens, comme le montre un récent sondage mondial de Gallup: seulement 14% des travailleurs indiens se disent épanouis dans leur travail, tandis que 86% ressentent une lutte quotidienne ou de la souffrance. Ce mécontentement se traduit par des taux de rotation du personnel extrêmement élevés.

Le phénomène de surtravail en Inde a été accentué par la spécialisation du pays dans le secteur des services aux entreprises, qui a explosé depuis les années 1990. En seulement trois décennies, l'Inde s'est imposée sur la scène mondiale comme un centre névralgique des services, où la demande ne cesse de croître. Les professionnels doivent constamment répondre à des exigences croissantes, souvent au détriment de leur bien-être personnel.

Loin du désir croissant d'un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle observé dans de nombreuses sociétés occidentales, l'Inde semble faire face à des défis accrus dans ce domaine. La tragédie d’Anna Perayil met en lumière ce malaise et rappelle aux jeunes travailleurs indiens qu'à l'ère de l'intelligence artificielle et de l'automatisation, la souffrance au travail persiste. Ces récits d'épuisement professionnel appellent à une réflexion urgente sur le modèle de travail actuel et les réformes nécessaires pour garantir le bien-être des employés dans un monde en rapide évolution.