Science

Dominique Méda, sociologue : « Les Français ne refusent pas le travail, ils refusent d’y souffrir »

2025-03-28

Auteur: Chloé

Dominique Méda, philosophe de formation et énarque, est devenue une référence en matière de travail et de justice sociale. Elle enseigne à l'université Paris-Dauphine et préside l'institut Veblen, où elle défend un modèle économique plus équitable. Dans son dernier livre, "Une société désirable. Comment prendre soin du monde", elle explore de nouvelles approches pour une économie socialement juste et respectueuse de l’environnement.

Depuis plus de trois décennies, Méda étudie le concept de travail, souvent perçu de manière unidimensionnelle en tant que coût pour les entreprises. Cette vision, qu'elle qualifierait de réductrice, contraste fortement avec sa perspective philosophique qui valorise le travail comme un vecteur d’épanouissement personnel et collectif. Son premier ouvrage, "Le Travail, une valeur en voie de disparition", plaidait pour une diversité d’activités au sein de la société.

Dans ses réflexions, elle évoque également la loi des 35 heures, considérée comme un tournant social majeur en France, tout en soulignant que beaucoup reste à faire pour améliorer les conditions de travail. Elle déplore notamment que la deuxième loi Aubry ait déformé le sens initial de cette réforme. En effet, elle soutient que la lutte contre le chômage passe par une véritable répartition du travail et une amélioration globale des conditions de travail.

Méda insiste sur le fait que, contrairement aux stéréotypes, les Français se soucient profondément de leur travail. Les données révèlent que près de 40 % des travailleurs estiment ne pas pouvoir tenir jusqu'à la retraite en raison de la dégradation de leurs conditions de travail. Selon elle, la souffrance au travail est exacerbée par des objectifs inatteignables et un manque de reconnaissance de la part des employeurs.

Les jeunes générations, souvent accusées de ne pas vouloir travailler, montrent en réalité un désir d’un emploi qui ait du sens et qui soit en harmonie avec leur vie personnelle. Elles se montrent réticentes à s'engager dans des emplois jugés nuisibles pour l'environnement ou peu éthiques, pris dans un système qui valorise la performance au détriment de la qualité de vie.

Enfin, Méda aborde les enjeux de l'intelligence artificielle et de la surveillance accrue au travail. Elle appelle à établir des réglementations claires afin de protéger les droits des travailleurs face à la déshumanisation croissante liée à ces technologies. La nécessité d'une planification économique est également mise en avant pour permettre une transition écologique équitable, engendrant des emplois durables et respectueux de l'environnement.

Alors que le monde du travail évolue rapidement, Dominique Méda nous invite à repenser l'économie de manière à garantir un futur désirable et équitable, en plaçant l'humain et l'environnement au cœur des préoccupations.