Science

Disparition de Néandertal : Pour le chercheur Ludovic Slimak, « sa fin s’apparente à une forme de suicide »

2024-09-15

Qui était donc Néandertal, ce lointain cousin de l'Homme moderne dont nous portons en nous quelques gènes ? Comment et surtout pourquoi s'est-il éteint après des centaines de milliers d'années d'occupation du territoire eurasiatique ? Ces questions demeurent sans réponse alors que les vestiges de cette espèce humaine disparue il y a 40 000 ans fascinent toujours les chercheurs.

Une nouvelle étude publiée dans la revue Cell Genomics s'intéresse à la découverte de restes archéologiques et tente d'éclaircir cette énigme. Tout commence en 2015, lorsque l'équipe de chercheurs menée par Ludovic Slimak de l'Université Paul Sabatier met au jour plusieurs dents à l'entrée de la grotte Mandrin, située dans la Vallée du Rhône. Les fouilles minutieuses permettent d'extraire non seulement 31 dents, mais également une mandibule, des fragments de crâne, des phalanges et de très nombreux petits ossements. L'analyse de ces restes révèle qu'il s'agit d'un individu néandertalien, nommé Thorin, datant de 42 000 à 45 000 ans, ce qui fait de cette découverte le premier individu d'une telle espèce trouvé en France depuis 1979.

Surprise : les analyses ADN révèlent que Thorin appartient à une lignées génétiquement isolée en Europe pendant 50 000 ans. En effet, cet individu illustre l'existence d'une autre lignée néandertalienne ayant évolué de manière parallèle et séparée des autres, ouvrant ainsi la porte à des réflexions sur l'isolement social et culturel des Néandertaliens.

Ludovic Slimak souligne que les différents groupes néandertaliens étaient conscients de la présence d'autres congénères à proximité, mais le peu de mélange génétique observé dans les analyses indique des interactions très limitées et un isolement culturel. Cette auto-suffisance pourrait être liée à leur vision du monde, très différente de celle de l'Homme moderne, Sapiens.

La question de l'extinction de Néandertal est complexe. Contrairement à la croyance populaire qui associe leur disparition à des catastrophes comme des maladies ou des changements climatiques, Slimak propose une autre perspective. Il avance l'idée que l'arrivée de Sapiens a engendré un choc culturel, provoquant un effondrement de la conception du monde des Néandertaliens. « À partir du moment où Sapiens arrive sur ses terres, Néandertal commence à s'éteindre », affirme-t-il, suggérant que ce phénomène pourrait être comparé à une forme de suicide collectif. Le chercheur conçoit que la pression de devoir assimiler une nouvelle réalité a pu amener Néandertal à se laisser mourir lentement.

Enfin, cette étude sur Néandertal ne serait pas seulement d’un intérêt historique. Ludovic Slimak fait un parallèle pertinent avec notre crise environnementale actuelle, soulignant que notre tendance à imposer des interconnexions sociales, souvent au détriment de ce qui est différent, pourrait nous mener à des conséquences similaires. En comprenant les erreurs du passé, nous pourrions éviter de les reproduire, il est essentiel de réfléchir à la manière dont nous interagissons avec notre environnement et entre nous.

Ceci nous pousse à méditer sur la nécessité d’un équilibre : reconnaître la valeur de la diversité tout en apprenant des histoires de nos ancêtres pour naviguer plus prudemment vers l’avenir.