Nation

Chantier de l’A69 : un coup de force des élus du Tarn pour légaliser des travaux controversés

2025-03-14

Auteur: Sophie

La tempête continue autour du chantier de l’A69, après la décision sans précédent du tribunal administratif de Toulouse, qui a déclaré le projet illégal le 27 février. Cette autoroute, qui doit relier Castres à Toulouse sur 53 kilomètres, soulève de vives tensions entre ses défenseurs et ses opposants. Les partisans du projet, dont plusieurs milliers se sont rassemblés autour de Castres le 8 mars pour exprimer leur soutien, y voient un enjeu essentiel pour le développement économique de la région.

Le ministre des Transports, Philippe Tabarot, n’a pas mâché ses mots en qualifiant la situation de « ubuesque » et a mis en avant les conséquences économiques catastrophiques du gel des travaux. Pour sa part, la ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, a exprimé son soutien à ce projet, arguant qu'il représente une nécessité pour désenclaver le territoire.

Face à l'illégalité actuelle du chantier, un groupe de parlementaires du Tarn, tous favorables à l'A69, est prêt à intervenir directement au cœur de la législation. Ce vendredi 14 mars, quatre élus – députés et sénateurs – comptent proposer une loi de « validation » visant à entériner rétroactivement les autorisations nécessaires pour poursuivre les travaux. Le député Jean Terlier, instigateur de cette initiative, insiste : « Nous ne pouvons pas laisser une décision de justice entraver un projet d'intérêt public. Nous, parlementaires, devons agir.

Cependant, cette manœuvre suscite des critiques au sein de la communauté juridique. Des experts soulignent que les lois de validation sont généralement conçues pour corriger de petites erreurs administratives, et non pour passer outre des décisions de justice significatives. Me Arnaud Gossement, spécialiste du droit de l’environnement, met en garde contre ce précédent : « Jamais je n'ai entendu un élu en France appeler à ignorer une décision judiciaire.

Les enjeux sont considérables. Proposer une telle loi pourrait priver les opposants d'une voie de recours, un droit protégé par la Cour européenne des droits de l'homme. Les opposants affirment que cette législation, si elle réussit, pourrait faire œuvre de destruction des droits des citoyens au profit d'intérêts économiques.

Jean Terlier reste néanmoins optimiste sur la possibilité de rassembler une majorité pour sa proposition, tout en rappelant que des sommes colossales – 300 millions d’euros d’investissements publics et privés – sont engagées dans ce chantier, ce qui, selon lui, justifie amplement leur démarche.

De plus, le soutien du gouvernement est crucial. Patrick Mignola, ministre des Relations avec le Parlement, a affirmé que l'exécutif assumerait ses responsabilités pour rendre l'autorisation environnementale légale rétrospectivement. Ce débat, qui promet d'être houleux compte tenu de son impact sur la séparation des pouvoirs et la protection de l'environnement, pourrait se retrouver à l'agenda parlementaire en mai, pendant des sessions consacrées à des propositions de loi.

Cette situation est à surveiller de près, car elle illustre les tensions croissantes entre les exigences de développement infrastructurel et la nécessité de respecter les décisions de la justice, posant ainsi la question fondamentale de la primauté du droit dans la démocratie.