Alors que la France envisage des solutions pour combattre la criminalité organisée, la question de la légalisation du cannabis se pose avec insistance. Quels effets économiques cette mesure aurait-elle ? Comment se structurerait le marché ? Et surtout, qu’en serait-il de la consommation ?

Une consommation à la hausse

La légalisation du cannabis arrive à un moment où la prohibition montre des signes d'inefficacité face à une consommation en pleine expansion. L'Office français des drogues et toxicomanie recense un nombre alarmant de 900 000 usagers quotidiens et 1,4 million de consommateurs réguliers. En trente ans, le nombre d'adultes ayant expérimenté le cannabis a quadruplé, atteignant un adulte sur deux. Emmanuelle Auriol, économiste spécialisée, souligne que même si des arguments moraux existent contre la légalisation, il convient d'adopter une approche pragmatique pour mieux contrôler et réguler cette substance.

Des modèles à suivre ou à éviter ?

Auriol fait référence aux exemples du Colorado et de l'Uruguay, deux pays ayant opté pour des modèles de légalisation très différents. Alors que le Colorado a su répondre à la demande des consommateurs en offrant des produits variés et de qualité, l'Uruguay a connu des difficultés majeures en raison d'une approche imposée, considérée comme une erreur par de nombreux experts. Le modèle urugayen a montré que négliger la demande peut entraîner des échecs retentissants, un enseignement crucial pour la France.

Construire un modèle français

Pour la France, Auriol, en collaboration avec Pierre-Yves Geoffard, suggère un modèle de monopole d'État sur la distribution du cannabis, similaire à celui du tabac. Une telle mesure vise à mieux contrôler la fiscalité et à protéger les mineurs tout en garantissant un produit de qualité. Le coût de production d'un gramme de cannabis se situe près d'un euro, mais sur le marché noir, il atteint environ 11 euros. En proposant un prix de 9 euros, le modèle pourrait non seulement nettoyer le marché, mais également générer jusqu'à 2 milliards d'euros de recettes fiscales. De surcroît, la légalisation pourrait créer entre 27 000 et 57 000 nouveaux emplois en France.

La consommation d'autres substances

Bien que la légalisation puisse mécaniquement augmenter la consommation de cannabis, elle ne devrait pas entraîner, selon Auriol, une augmentation de la consommation de drogues plus dures. Elle note en effet que les gens ne se tournent pas automatiquement vers des substances plus dangereuses simplement parce que le cannabis est devenu légal. Ainsi, « légaliser, c'est consommer plus », mais cela ne signifie pas que cela laisse les portes ouvertes à d'autres substances stupéfiantes.

Conclusion

En somme, la légalisation du cannabis en France pourrait représenter une opportunité unique non seulement pour répondre à une problématique de santé publique, mais aussi pour engager une réforme économique significative. L'évolution vers un modèle légal, bien pensé et contrôlé pourrait transformer le paysage du cannabis, offrant ainsi des bénéfices à la fois économiques et sociaux. Que décidera la France ? La réponse pourrait changer la face du pays.