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Autriche : les conservateurs se tournent vers l'extrême droite pour un nouveau gouvernement

2025-01-06

Auteur: Léa

Dimanche, les conservateurs autrichiens ont annoncé leur intention de commencer des négociations avec l'extrême droite pour former un nouveau gouvernement. Cette décision marine une tournure surprenante après l'échec des pourparlers de coalition avec les libéraux et les sociaux-démocrates. L'Autriche, membre de l'Union européenne, a été plongée dans une incertitude politique importante lorsque le chancelier conservateur, Karl Nehammer, a abruptement mis un terme aux discussions visant à établir un gouvernement centriste sans l'extrême droite, qui a pourtant remporté la majorité lors des élections législatives de septembre dernier.

Dans la foulée de cette annonce, Nehammer a prévenu qu'il démissionnerait « dans les prochains jours » de son poste de chancelier ainsi que de la présidence du Parti populaire autrichien (ÖVP). Ce dernier occupait ces rôles depuis fin 2021. Lors d'une réunion stratégique, le secrétaire général du parti, Christian Stocker, a été désigné comme chef par intérim.

« Ce pays a besoin d’un gouvernement stable »

Christian Stocker a affirmé avoir reçu la légitimité de son parti pour amorcer les négociations de coalition avec l’extrême droite, insistant sur le besoin urgent de stabilité gouvernementale. « Nous ne pouvons pas nous permettre de perdre plus de temps dans des campagnes électorales », a-t-il ajouté.

Le président autrichien, Alexander Van der Bellen, a exprimé son intention de rencontrer lundi Herbert Kickl, dirigeant du Parti de la liberté d'Autriche (FPÖ), pour discuter de la situation politique actuelle. Van der Bellen a remarqué que les voix au sein de l'ÖVP opposées à une alliance avec Kickl se faisaient plus rares, signifiant ainsi l'ouverture d'une nouvelle possibilité politique.

Lors d'une conférence de presse, Stocker a salué cette volonté de dialogue avec l’extrême droite, un parti ayant recueilli près de 29% des suffrages aux dernières élections tout en peinant à établir des alliances.

Une coalition de plus en plus probable

À mesure que la situation évolue, les observateurs se demandent si Van der Bellen invitera l'extrême droite à former le prochain gouvernement. Initialement, il avait demandé aux conservateurs d’instaurer un gouvernement qui respecte les fondations de la démocratie libérale du pays, ayant exprimé par le passé ses réserves concernant Herbert Kickl, dont le parti bénéficie maintenant de 35% d'opinions favorables dans les sondages.

Le politologue Thomas Hofer a déclaré à l'AFP qu'une coalition dirigée par l'extrême droite, avec l'ÖVP comme partenaire minoritaire, semble désormais « hautement probable ». Il a souligné que l'ÖVP ne pourrait pas se permettre d'aller vers des élections anticipées. Lors de son annonce de démission, Nehammer a exprimé sa volonté d'agir comme une « force politique centrale » pour contrer les mouvements radicaux. Bien qu'il se soit montré ouvert à l’idée de discuter avec le FPÖ, il avait toujours exclu une collaboration avec Kickl.

Dans un communiqué, Kickl n’a pas hésité à désigner les partis en concertation comme des « perdants », ajoutant que le pays traversait une période de chaos plutôt que de stabilité après trois mois de négociations infructueuses. Rappelons que lors des élections, l'ÖVP a obtenu 26% des voix, suivie des sociaux-démocrates (SPÖ) avec 21%. Traditionnellement, l'ÖVP a gouverné avec le FPÖ à deux reprises, en 2000 et en 2017, tissant ainsi un lien délicat entre conservatisme et dialogues avec les extrêmes.